Le taux de rendement interne (TRI) est l’une des métriques les plus utilisées en immobilier. Pour les petits projets avec des investisseurs privés, on peut souvent s’en sortir sans trop se préoccuper du TRI (on parle de profits, durée du projet etc). Mais lorsqu’on commence à interagir avec des investisseurs institutionnels, c’est important de bien comprendre le concept.
Définition
La définition officielle du taux de rendement interne est le taux d'actualisation qui fait en sorte que la valeur actuelle d'une série de flux monétaires est égale à zéro. Vous pouvez oublier cette définition officielle, aucune importance.
En termes simplifiés, le TRI est le rendement annuel moyen sur l’argent investi dans un projet. Le TRI tient compte des $$$ de profits et de la durée du projet.
Prenons un exemple simple : disons que j’achète un bâtiment pour 100$. Pendant 3 ans, j’encaisse 10$ de profits. À la fin de l’an 3, je vends le bâtiment pour 100$. Dans cet exemple, le TRI serait simplement de 10% (10$ de profits annuels / 100$ d’investissement initial = 10%).
Applications
La vraie vie est évidemment plus complexe que mon exemple ci-haut. Les flux monétaires sont variables d’année en année. Le prix de vente de mon bâtiment est différent du prix d’achat. Et ainsi de suite.
Premièrement, on calcule le TRI avec Excel. On utilise la fonction TRI (fonction IRR en anglais). Comme je le mentionnais ci-haut, le TRI tient compte des profits et de la durée du projet. Autrement dit, si 2 projets ont des profits identiques mais une durée différente, le TRI de ces 2 projets sera différent.
Le TRI est utile pour comparer un peu plus facilement des projets complètement différents. Par exemple, si un projet a une durée de 2 ans alors qu’un autre a un échéancier de 9 ans, c’est normal que le projet de 9 ans rapporte plus de $$$ de profits. Mais mon argent est aussi gelé dans le projet pour 9 ans. Peut-être que faire plusieurs projets de 2 ans m’offrirait un meilleur rendement. Ou pas. En utilisant le TRI (au lieu simplement de regarder les profits en $$$), je peux comparer un % de rendement moyen annuel et ainsi comparer des pommes avec des pommes.
Assez de théorie. Regardons concrètement comment les variables profits et temps viennent influencer le TRI.
Variables qui influencent le TRI
Reprenons notre exemple de départ et regardons comment le TRI bouge si le projet est modifié.
Scénario de base :
Donc dans mon scénario de base, mon investissement initial de 100$ génère un profit de 30$ et un TRI de 10.0%.
Une hausse des profits viendrait évidemment faire augmenter mon TRI. Si au lieu de 10$ de revenus d’opération nets par année, j’en générais 15$, mes profits augmenteraient à 45$ et mon TRI augmenterait simplement à 15% :
Au lieu d’une hausse de mes revenus d’opération net de 5$ annuels, disons plutôt que mes revenus demeurent à 10$ par année, mais je vends le bâtiment pour 15$ de plus à l’an 3 :
C’est ici qu’on voit apparaître l’impact de la variable temps. Mon profit est de 45$, identique au scénario précédent. Mais contrairement au scénario précédent, je n’ai pas reçu 5$ de plus par année ; j’ai plutôt reçu 15$ de plus à l’année 3. Bien que le total en $$$ soit le même pour les 2 scénarios (45$ de profits), mon TRI est de 14.3%, par rapport à 15.0% au scénario précédent. Comme investisseur, évidemment je préfère recevoir mes profits le plus tôt possible (pour pouvoir les réinvestir dans d’autres projets, etc). Si je dois attendre des années avant de recevoir un même montant, mon rendement est impacté négativement.
Un exemple encore plus extrême : disons que je ne reçois aucun $$$ de profits pendant 3 ans, mais que je vends mon bâtiment pour 145$ à l’an 3 :
Le profit est encore une fois de 45$. Mais étant donné que je ne touche à mon argent qu’à l’an 3, mon TRI est rendu à 13.2%.
Sans trop entrer dans les détails techniques, le TRI est calculé selon le principe des intérêts composés. Le rendement non payé porte lui-même intérêt dans les périodes subséquentes.
Donc si j’investis 100$ et que je veux générer 15% de TRI, je dois encaisser 15$ à l’an 1, 15$ à l’an 2 etc. Si ce n’est pas le cas (disons que je reçois 0$ à l’an 1), le rendement est cumulatif : je devrai recevoir au cours de la deuxième année le 15$ non-reçu de l’an 1 + 15% x15$ sur le rendement non-reçu de l’an 1 + 15$ dû à l’an 2 = 15$ + 2.25$ + 15$ = 32.5$. En recevant 0$ à l’an 1 et 32.5$ à l’an 2, je génère 15% de TRI, tout comme si je recevais 15$ à l’an 1 et 15$ à l’an 2.
Comparaisons entre projets
Le TRI représente un rendement annuel en %. Il permet de comparer un projet résidentiel de 4 ans qui demande un investissement initial de 5M$ et un projet bureau de 12 ans qui demande un investissement initial de 22M$. Le TRI permet de comparer le rendement sur une base annualisée de chaque $$$ de votre portefeuille.
Évidemment, le TRI n’est jamais la seule métrique à prendre en considération lors de l’analyse. Dans l’exemple précédent, si je suis gestionnaire d’un fonds d’une durée de vie de 5 ans, peut-être que le projet bureau ne serait pas optimal, même si son TRI était supérieur au projet résidentiel.
Manipulations faciles?
Beaucoup de gens ont affirmé dernièrement (haut et fort, après tout la controverse ça attire l’attention) que les prévisions de TRI n’avaient pas leur place dans les analyses. Trop facile à manipuler, basé sur des prévisions à long terme pas fiables, etc.
C’est vrai qu’il est possible de manipuler le TRI. Si je prends pour hypothèse que mon projet ne génère pas beaucoup de liquidités pendant 5 ans, mais qu’à la fin de la 5e année je vais vendre l’actif pour une fortune, ça se peut que ça n’arrive pas. Le TRI n’est pas différent des autres métriques : “garbage in, garbage out”.
Un investisseur immobilier se fait présenter des dizaines de projets par mois. S’il regarde les TRI projetés et qu’il choisit d’investir dans les projets dont le TRI projeté est le plus élevé, ça se peut que ça se passe mal. Le TRI est aussi important que les hypothèses qui ont été prises pour le calculer. C’est facile de mettre dans Excel une augmentation de loyer prévue de 14% dans 2 ans et de montrer un TRI projeté impressionnant. C’est pas mal moins facile de réaliser ce 14% pour vrai. Quand on se fait présenter des rendements projetés, c’est important de comprendre les hypothèses principales et de poser des questions.
Ça vaut pour le TRI, ou pour n’importe quelle autre situation ou métrique. Si je vais chez un concessionnaire automobile et que je demande au 1er vendeur croisé si je devrais acheter l’auto ici à côté, sans poser d’autres questions, ça se peut aussi qu’il me manque quelques infos pertinentes...
Conclusion
Le taux de rendement interne (TRI) est une métrique qu'on peut vulgariser comme étant le rendement annuel moyen généré par un projet. Les investisseurs institutionnels sont souvent rémunérés en fonction du TRI généré par leur portefeuille, d’où l’importance pour un développeur de bien comprendre le concept. Certains investisseurs investissent uniquement dans des projets qui prévoient générer un TRI supérieur à x%. Le x% varie en fonction du risque du projet, de la classe d’actifs, et d’autres facteurs. Dans les prochaines semaines, je vais faire un résumé des rendements moyens requis par les investisseurs pour divers types de projets.
BRIQUES ET DOLLARS
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